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23 septembre 2012 7 23 /09 /septembre /2012 19:31

 

 

L'attribution du droit de vote à des étrangers dépend de l'idée que l'on se fait de la démocratie. Cette démocratie est amputée quand elle n'englobe pas toutes les personnes qui vivent sur un même territoire. En France, jusqu'en 1944, les femmes et les étrangers, encore aujourd'hui. Cette amputation ne peut se justifier par l'exigence de réciprocité.

 

 

Tout d'abord parce qu'un droit de l'homme ne peut être l'objet d'un marchandage ! Cela fait dépendre la qualité de la démocratie, ici, de l’origine nationale de l'étranger, qui a quitté son pays pour différentes raisons, quelquefois justement démocratiques. Double peine : un citoyen du monde qui ne peut voter ni ici, ni là-bas !

 


Réciprocité qui est toujours invoquée pour refuser, jamais pour ouvrir : les Français ont le droit de vote dans de nombreux pays quelquefois depuis fort longtemps – dans le canton de Neuchâtel (Suisse) depuis 1849 et quelquefois à toutes les élections comme au Chili, en Nouvelle-Zélande, en Uruguay, au Venezuela...).

 


On ne voit pas en quoi, « accorder le droit de vote local aux étrangers (non seulement des pays du sud mais également de Norvège, de la Suisse, de la Russie, ou de la Chine) sans qu'il y ait réciprocité reviendrait à accorder un traitement privilégié aux étrangers non communautaires » (1)alors que cela n’aboutirait même pas à les mettre sur un pied d'égalité, on pourrait même dire maintiendrait un traitement discriminatoire entre étrangers en fonction de la nationalité, les citoyens de l'Union européenne ayant en plus le droit de vote et d'éligibilité aux élections européennes.

 


Il faut noter d'ailleurs que les Français ont le droit de vote local en Norvège et dans certains cantons suisses ! Et que ce droit est aussi accordé par des pays de l'UE à des citoyens non-communautaires : (Belgique, Danemark, Estonie, Finlande, Irlande Lituanie, Luxembourg, Pays-Bas, Slovénie, Suède). Sans oublier le Royaume-Uni, où les résidents venant d'un pays du Commonwealth ont le droit de vote et d'éligibilité à toutes les élections.

 


Il est curieux aussi de penser que la réciprocité « permettrait d’ouvrir la vie locale à ceux qui veulent s'enraciner en France » (1) comme si la volonté d'enracinement des étrangers dépendait de la volonté des gouvernements français et du pays d'origine.

 


Dans les faits, il n'y a pas un seul parlementaire qui ait fait une proposition de loi en ce sens.

 

 

 

 


1 - Proposé au Courrier des lecteurs du Monde, à la suite d'un article de Didier Maus (Le droit de vote supposerait la réciprocité), Président émérite de l'Association internationale de droit constitutionnel.Paru dans le Monde du 22/09/12.

 

2 - Hervé ANDRES : Le droit de vote des étrangers, État des lieux et fondements théoriques, Thèse pour le Doctorat de sciences juridiques et politiques, 2007.

 


 

NB : Le passage suivant est copié de "Résidents étrangers, Citoyens ! Plaidoyer pour une citoyenneté européenne de résidence."  Éditions Presse Pluriel 2003. Tout le livre peut être consulté et téléchargé :  http://paul-oriol.pagesperso-orange.fr/


 

4.8 La réciprocité

C’est aussi avoir une piètre idée de la démocratie que d’avoir une exigence de réciprocité.

La réciprocité ne peut s’exercer qu’entre systèmes proches. Et encore, cette réciprocité n’a jamais été invoquée pour étendre le droit de vote, elle est toujours avancée pour empêcher cette extension. Car ceux qui en parlent aujourd’hui n’ont pas encore déposé de proposition ou de projet de loi pour donner le droit de vote aux élections locales aux Norvégiens, aux Suisses des cantons de Neuchâtel ou du Jura ou `a toutes les élections aux Néo-zélandais qui l’ont donne aux résidents français.


En l’exigeant pour des personnes qui viennent de pays non-démocratiques, on est ainsi assure de n’avoir jamais à le donner. Plus grave, cela conduit à faire dépendre la qualité de la démocratie en France d’un despote quelconque (avec lequel la France entretient par ailleurs souvent d’excellentes relations). Cela conduit à reconnaître un droit de regard de ces dictateurs sur les libertés, ici, de personnes qui ont quitte leur pays quelquefois après en avoir combattu le régime ! Quel crime ont-ils commis pour être déchus des droits civiques là-bas et ici ?


Quand les Pays-Bas ont attribue le droit de vote aux élections municipales à leurs ressortissants étrangers, Hassan II, alors roi du Maroc, a demande à ses ressortissants de ne pas entrer dans ce jeu et de rester Marocains. Tous les “grands démocrates” qui ont voulu s’opposer à la participation de leurs ressortissants se taisent désormais. Ils savent que les choses sont en train de changer.


Si “nos ancêtres” de 1789 avaient attendu la réciprocité pour proclamer la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, s’il fallait attendre la réciprocité pour appliquer les lois aux étrangers vivant en France ! Il n’y aurait jamais eu de déclaration, ces lois seraient différentes suivant l’origine des personnes. Si ces personnes sont là pour une longue durée, il y a tout intérêt a les intégrer le plus rapidement possible dans le système politique, inutile de multiplier les obstacles. Si elles doivent repartir un jour, leur permettre de juger, par l’expérience, des avantages de la gestion démocratique de la cite (qui ne se résume pas cependant au droit de vote et intelligibilité mais dont ces droits font partie) devrait être considère comme un devoir pour l’État français, comme pour tout État démocratique. Cela peut servir de travaux pratiques, de terrain d’expérience, de lieu d’apprentissage. Dans tous les cas, ils s’en souviendraient lors du retour au pays d’origine. On ne voit pas quel danger, il peut y avoir, on perçoit facilement les bénéfices qu’on peut en retirer pour l’image de la démocratie.

 

 

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