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Réflexions sur l'actualité politique et souvenirs anecdotiques.

Construire un récit européen… ? D’où nous venons…

Construire un récit européen… ?  D’où nous venons…

Dans l’émission de France Culture à propos de son dernier livre (1), Géraldine Schwarz, dans ses déclarations, construit un récit européen, comme on dit récit national, qu’elle base sur ce qu’elle appelle nos trois valeurs européennes. Dont les deux termes – valeurs, européennes – sont discutables : le christianisme, le capitalisme, la liberté.

Il n’est pas question de nier que le christianisme est important dans les fondements de l’Europe et la conscience des Européens. Est-ce une valeur ? Cette qualification est encore plus discutable quand elle précise le judéo-christianisme. Depuis peu, faudrait-il ajouter, pour ne pas oublier les siècles d’antisémitisme chrétien. Cet antisémitisme dont l’apogée, européen, est la « solution finale ». Peut-être à l’origine, par la responsabilité objective et le sentiment chrétien de culpabilité, de la volonté de dépassement du christianisme antisémite séculaire par le judéo-christianisme.
Il serait peut-être, plus judicieux de coupler le christianisme avec la sécularisation (la laïcité n’en est que la version franco-catholique) fruit de valeurs européennes comme les Lumières, la science moderne et les techniques nées en Europe.

À la source des valeurs européennes, il est étonnant d’entendre l’important silence sur le monde grec (et romain), indubitablement européen, aussi important dans la philosophie que dans la science européennes. D’autant que le christianisme qui n’est pas né en Europe, y a trouvé surtout sa base d’expansion d’abord, à travers les tentatives d’empires depuis le XVII°, et sa base de repli ensuite (avec l’Amérique du nord), depuis la seconde partie du XX° et la décolonisation.
Voyages et déclarations de François ne sont-ils pas des efforts pour essayer de redresser cette vision de christianisme européen, christianisme colonial en quelque sorte pour un christianisme universel.

La deuxième valeur fondamentale serait le capitalisme. Le capitalisme, une valeur ? Européenne ? Objecte l’interlocuteur de Géraldine Schwarz ? En lien avec l’État, précise-t-elle.

Le capitalisme est né en Europe avec le développement de techniques au service de la production de biens… et de rentes. S’il a eu des modalités diverses, dont le capitalisme rhénan, européen, il existe aujourd’hui partout, quel que soit le qualificatif qu’on lui donne, en lien étroit avec les États ! Que serait l’antiétatique Elon Musk, l’extrême libéral, sans l’État ? La recherche financée par l’État ? Les choix politiques de l’État ? Les commandes de l’État ?

Les Droits de l’Homme et des peuples, la démocratie ne seraient-ils pas des valeurs de l’Europe ? Certes incomplets, imparfaits et imités de façon caricaturale dans certaines régimes autoritaires, quelquefois chrétiens, avec des élections « démocratiques » ? En réalité, combattus, en danger partout, à l’extérieur de l’Europe et en Europe aussi !
Ces valeurs sont-elles chrétiennes par essence ou le sont-elles devenues par onction ?

Est-ce de cette valeur que Géraldine Schwarz veut parler quand elle avance comme troisième valeur européenne la liberté.
La revendication de liberté est partout car les fers sont partout. L’esclavage existe de tout temps, sur tous les continents, dans des formes diverses, plus ou moins perfectionnées et toujours cruelles. Partout, toujours, les révoltes, individuelles, collectives. Sauvagement réprimées (2) .

Si l’Europe est à l’origine de bien des formes de subordination, de l’esclavage à l’exploitation capitaliste en passant par l’impérialisme ancien et nouveau, elle est aussi à l’origine de bien de luttes émancipatrices comme la sécularisation, la suppression au moins formelle de l’esclavage dans le monde depuis le XVIII°, la revendication de liberté et d’égalité juridique, économique, sociale pour les personnes et les peuples…

Inventer un récit européen ? Pourquoi pas ! Un récit des luttes européennes pour la liberté et légalité contre toutes les dictatures. Toutes les exploitations. Y compris européennes.

NB : Le tryptique, chrisianisme (dans sa diversité), capitalisme, liberté (moins encadrée), est peut-être plus adapté aux États-Unis avec quelques réserves partagées.

1a – À propos d’une émission de France Culture : D’où nous venons. Ce qui nous unit, ce qui nous divise. Géraldine Schwarz. Flammarion

1b- L'émission : https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/l-invite-e-des-matins (à partir de la 21°mn)

2 - Les Mondes de l’Esclavage, Seuil

Construire un récit européen… ?  D’où nous venons…
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