Les dernières élections, aux seules conséquences régionales, n'en finissent pas d'agiter les pensées de notre petit timonier. Le grand débat national sur l'identité, trop intellectuel pour être mené correctement par le gouvernement, a manqué sa cible - récupérer les voix de l'extrême droite - malgré quelques dérapages contrôlés (?).
Sarkozy a été invité par ses affidés à "revenir aux fondamentaux" simplifiés. Ce qu'il fait au prix de quelques contorsions face à la légalité.
Le président a mobilisé le premier ministre et autres féaux pour se lancer dans l'aventure de l'interdiction totale du voile intégral. Connaissant l'opposition de la majorité de la population à ce voile, il a décidé de passer outre à l'avis du Conseil d'Etat et de la commission ad hoc de l'Assemblée nationale pour suivre ses troupes emmenées par le président du groupe UMP à l'Assemblée nationale.
Face à sa chute dans les sondages, face aux difficultés dans la gestion des contre-réformes, le but est de créer une diversion par l'affrontement. Détourner l'attention des problèmes graves que traversent la France et l'Europe. Tromper de colère ceux qu'il s'apprête à dépouiller. En fabriquant si nécessaire le fait divers : autour de la situation matrimoniale d'une conductrice verbalisée ! Le but n'est pas de faire une loi, une loi applicable...
L'important est de préparer l'élection de 2012 en séduisant l'électorat potentiel de Marine Le Pen, probablement plus dangereuse que le vieux chef du FN. De montrer que 3 ans de Sarkozy valent plus que 50 ans de Le Pen.
Si la loi est voté, elle risque fort d'être récusée par le Conseil d'Etat. Le Président, le Gouvernement, la majorité le savent, cela ne semble pas les gêner. François Fillon s'est dit prêt à "assumer le risque juridique" et a choisi de passer outre. Si le Conseil d'Etat revient sur son avis défavorable à l'interdiction générale du voile intégral, ce sera une atteinte grave à la démocratie et à ses institutions.
Dans tous les cas, des clivages auront été exacerbés entre différentes parties de la population, clivages qui, un jour ou l'autre, risquent d'avoir des conséquences graves.
Mais il n'est pas sûr qu'il atteigne son but. Il est fort possible que des consciences se réveillent dans toutes les couches de la population, devant l'utilisation partisane et dangereuse de questions qui méritent d'être traitées plus sereinement, au fond. Et qui auraient pu trouver des solutions relativement consensuelles.
Les Français, y compris de droite, ont refusé de se laisser entraîner dans le piège tendu par le débat sur l'identité. Il faut espérer qu'ils vont ici aussi entrer en résistance et indiquer au Président que le matin, en se rasant, il devrait commencer à songer à sa retraite.